mardi 23 mars 2010

Annie Leclerc, La honte (Paedophilia)

"Comment entendre les grands, les parlants, les bienveillants, les véridiques, lorsqu'ils proclament que les grands, les parlants, peuvent être malveillants et menteurs ? Qu'est-ce qu'un loup qui se révèle d'autant plus loup qu'il ne se comporte pas d'abord comme un loup ?"

....

"Depuis quelques temps, on incite l'enfant, à grand renfort de publicité, à témoigner - il faudrait dire à dénoncer - des agressions dont il a été victime. Mais comment peut-il 'dénoncer' celui auquel il n'a pu dire non ? Sa honte d'avoir compris sans vouloir montrer, sa honte d'avoir plié pour ne pas dénoncer l'agresseur à lui-même, s'aggrave maintenant de celle de s'être tu, de se taire encore, et toujours plus honteusement puisqu'on l'assure qu'il devrait parler. Décidément on veut que l'enfant ait honte.
Voulant l'aider, on risque bien de l'enfoncer plus obscurément encore.
Si j'imagine l'effet que peut produire, sur un enfant soumis à l'inceste par exemple, ces appels allègres à la dénonciation, cette soudaine et furieuse condamnation du crime pédophilique, je crains qu'il ne soit, dans bien des cas, désastreux. Il ne veut pas que ce soit aussi terrible qu'on dit."

....

"Est-ce lui l'enfant qui devrait, par sa plainte, fendre la mère en deux, briser la famille en quatre, livrer le bourreau aux crachats publics, à la police, au cachot ?
Est-ce à lui de précipiter parmi les siens le désastre qu'il cherche à leur épargner par son silence ?...

...Et puis parler c'est faire exister la chose, lui donner sa pleine réalité. Une fois que c'est dit, on ne peut plus effacer, oublier... On peut toujours espérer avoir fait un mauvais rêve, un mauvais rêve de loup, qui se termine bien."

6 commentaires:

  1. Ou la...
    Chuis pas d'accord avec vous madame ( en plus je pense un post dessus)

    Si l'enfant à honte c'est juste parce que le sexe par définition est honteux. Pour certaines familles il est même sale.
    Et même si je suis d'accord sur le fait qu'en général les parents incitent les enfants à avoir honte, je pense qu'ils le font aussi pour tout et pour rien( notes, comportements colériques, etc...) et parce qu'eux même se mettent la pression.


    "cette soudaine et furieuse condamnation du crime pédophilique, je crains qu'il ne soit, dans bien des cas, désastreux. Il ne veut pas que ce soit aussi terrible qu'on dit."

    Ce qui est vécu de terrible pour l'enfant c'est le regard que l'on va avoir sur lui parce qu'il à vécu des actes sexuels et donc brrrrr caca sale. Souillé !!
    Ce serait moins terrible si on le prenait pour une personne qui a vécu un traumatisme, un choc physique et psy.
    Mais la société ne regarde pas de la même manière un enfant qui à perdu ses deux parents dans un grave accident de la route lui même accidenté ET un enfant victime d'un viol. L'un fait plus peur que l'autre. Moi, je sais lequel !

    "Est-ce lui l'enfant qui devrait, par sa plainte, fendre la mère en deux, briser la famille en quatre, livrer le bourreau aux crachats publics, à la police, au cachot ?
    Est-ce à lui de précipiter parmi les siens le désastre qu'il cherche à leur épargner par son silence ?..."


    Il semblerai que cette dame à elle aussi un conditionnement bien lourd !
    Mais ce n'est pas l'enfant qui va faire toute la procédure, mais la justice !!!
    L'enfant lui a juste à dire si on lui fait du mal. Et l'inciter à dire, c'est lui apprendre qu'on n'a pas à toucher à son intégrité. Lui apprendre à se respecter et par la même occasion respecter les autres !
    Cette notion de culpabilité et de responsabilité de l'enfant dans ces paragraphes est gerbante.

    "...Et puis parler c'est faire exister la chose, lui donner sa pleine réalité. Une fois que c'est dit, on ne peut plus effacer, oublier... On peut toujours espérer avoir fait un mauvais rêve, un mauvais rêve de loup, qui se termine bien."

    Ben décidement, je ne suis toujours pas d'accord.
    La réalité est là et bien là quoi qu'on fasse quoi qu'on ne dise. Elle est encrée au fond de nous, tapi et prête a ressurgir, elle n'attends que le bon moment. Mais malheureusement, il n'y en a jamais. Et je dirais même que plus on attend plus c'est pire.
    Rien n'est effacé ou oublié juste camouflé.
    Et le garder en soi peut être très destructeur. Mon corps à parlé bien des années avant mon ame. Et si je n'étais pas sortie du déni qui sait ce que mon corps aurait pu déclarer comme grave maladie pour que je l'écoute et analyse enfin ses mauux/mots ! Et je lui suis très reconnaissante d'avoir attendu toutes ces années de voir enfin tout ce que nous avons vécu lui et moi. Car, il aurait pu me faire payer très cher cette forme d'indifférence.
    Les enfants ont tout à gagner de parler...Le soin, l'accompagnement la reconnaissance de leur statu de victime et ainsi le pouvoir de se reconstruire.

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  2. Attention ! Je ne crois pas qu'A. Leclerc expose un programme ou une politique, mais elle soulève des problématiques du point de vue de l'enfant. Je sais que, si on avait essayé de me séparer de ma mère, comme on a essayé, j'aurais tout fait pour rester avec elle. A peine entré au collège, j'ai fait l'école buissionnière pour me rendre au tribunal le jour où mes parents comparaissaient en audience pour leur divorce et je me suis présenté à l'improviste, à la surprise de tous, pour dire que je ne voulais pas quitter ma mère. Je fus donc le seul à avoir été confié sans discussion à ses soins.

    La question n'est pas d'attribuer une responsabilité à l'enfant, mais que l'enfant se sent responsable lui-même et s'attribue ces responsabilités parce qu'il ne peut pas faire autrement. Pour lui, il est vidal que les adultes aient raison et soient bons et s'il est nécessaire de dénoncer les crimes pédophiles, il convient de prendre en compte le mode de pensée de celui qui n'a pas les mots: il faut lui apprendre les mots, et non pas lui mettre les mots des adultes dans la bouche, ce qui serait une seconde violence.

    Par contre, la responsabilité des adultes va au-delà que la simple écoute: combien de parents avaient tous les indices sous les yeux et n'ont pas voulu comprendre, pas voulu voir. Mon père en premier. Le problème de Paedophilia, c'est qu'on met l'enfant au centre de tout sans jamais s'intéresser à lui: l'enfant de Paedophilia n'est que la projection des adultes, ce qui laisse les enfants réels en proie aux pédophiles. Parce qu'on ne donne pas les mots à celui qui ne parle pas, parce qu'on l'enferme dans un monde idyllique qui n'a rien de réel, l'enfant est sans armes, sans préparation, face aux manipulations des pédophiles les plus tendres ou les plus sadiques. C'est ce que dénonce, à mon sens, quelqu'un comme A. Leclerc. Il faudrait un peu moins parler de protection de l'enfance et un peu plus d'éducation des enfants pour leur donner le moyen de se défendre: c'est ce que tu a fais toi-même avec tes enfants, comme moi, en leur parlant. On n'ose pas parler de pédophilie aux enfants parce qu'on a peur de leur parler de sexualité, pauvres anges: mais ces pauvres anges ne sont pas idiots et, même s'ils ne connaissent pas la sexualité adulte, ils ont des idées sur la sexualité.

    C'est pourquoi, étant d'accord avec tout ce que tu dis, je ne pense pas que tout cela aille à l'encontre ce dont parle A. Leclerc: nous parlons tous bien de la même chose, selon moi.

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  3. Mmh, les extraits sortis du contexte sont trompeurs alors.

    "mais elle soulève des problématiques du point de vue de l'enfant. Je sais que, si on avait essayé de me séparer de ma mère, comme on a essayé, j'aurais tout fait pour rester avec elle."

    Mais les problématiques du point de vue de l'enfant sont conditionnées par les adultes. Et du coup avec ces extraits je n'ai pas l'impression qu'elle fait avancer le schmilblick.
    Il n'y a pas que la sexualité qui est rentrée en compte dans ma manière d'accompagner mes enfants.
    Quant je parle d'accompagnement je parle éducation évidement.
    Il y a aussi cette "fidélité" aveugle parentale que je voulais ne pas reproduire. Cette fidélité qui justement les fait culpabiliser ou qui les empêchent de se faire leur propre opinion (qui en plus est bien plus saine que celle de n'importe quel adulte à mon sens) ou d'agir pour leur sécurité tant physique que psy.
    Je suis partie du principe que je suis pleine de faille et que mes réactions négatives face aux enfants étaient directement liées à celles-ci.
    L'enfant quant à lui est un être en devenir, apprentit de la vie.
    Et comme je sais pour l'avoir vécu qu'ils ont autant que moi des ressentis, je leur ai appris à les exprimer en le faisant moi-même...
    Résultant des courses à chaque fois qu'il m'arrive d'avoir une réaction inappropriée face à mes zouzoux ceux ci ne se gênent pas de le dénoncer. Sans cette peur de....
    Ils savent que mes failles et donc mes réactions ne sont pas liées à leur fait mais bien à mon éducation, conditionnement, etc...
    Ils n'ont aucune culpabilité de me blesser parce qu'ils savent que cette comunication est pour leur bien être et que mon amour pour eux est indestructible et me fait tout entendre de leur part, pour avancer, pour toujours plus de respect.
    Et je suis intimemment persuadée que si demain je devenais le monstre que ma mère était avec moi, mes petits pour se protéger eux même n'hésiteraient pas à me dénoncer. Ils en seraient tristes sûrement car cela ne les empêcheraient pas de m'aimer d'une certaine manière, mais le feraient parce qu'ils se respectent tout autant qu'ils respectent les autres.
    On n'est pas obligé de tout accepter de ses parents et encore moins si ce n'est pas fait dans le respect et pourtant cela a toujours été ainsi et c'est bien là que le bas blesse.
    Moi aussi comme Toi j'ai été conditionnée ainsi.
    J'espère que c'est explicite et sans trop de fautes, je ne me relis pas. Pas le temps
    Affectueusement Philippe.

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  4. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  5. Pour rajouter de l'eau à mon moulin, une citation de Martine Bouillon, dans Viols d'Anges":

    "Pourquoi nos sociétés prêtent-elles attention aux enfants ? Parce que ce sont des consommateurs-nés. Cet aspect des choses mis à part, qui s'intéresse à l'enfant ? Il ne vote pas, il n'a pas le droit à la parole, il n'est pas actif et n'est donc pas producteur de richesses. Il n'a qu'un droit, celui de se taire. Il se tait et on abuse de lui !"

    Et concernant la façon de recevoir les affaires de pédophilie comme Dutrouc (en effaççant soigneusement d'autres affaires plus proches de nous à peine mentionnées dans la presse) : "De toutes ces affaires, on peut néanmoins dégager une constante : les enfants ne semblent pas exister en tant qu'enfants, ils 'font partie des meubles'. Dans le discours, ou dans le silence, des uns et des autres, tout se passe comme si, tant qu'on utilise l'enfant, rien de répréhensible ne se produit.
    La faute rejaillira sur celui qui révèlera, celui par qui le scandale arrivera; le dénonciateur, et non l'auteur; et aussi sur l'enfant: 'Tous des vicieux, tous des menteurs'."

    Une chose m'a frappée relativement récemment: on parle de l'échec d'Outreau, mais tout à fait par hasard, je suis tombé sur un tout petit article de presse qui parlait du suivi continu des enfants d'Outreau, mais qui cela intéresse-t-il ? Plus important de disculper les adultes que de soigner les plaies des enfants.

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  6. On est bien d'accord. RIEN n'est fait pour les enfants, la société, la justice.
    Rien. Et après on s'étonne de voir des enfants de plus en plus violents, stessés, dépressifs.
    Et on oublie que nos enfants c'est la société de demain.

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