mercredi 6 janvier 2010

L'invention de soi, J.C. Kaufmann

1. L'identité est une construction subjective.
2. Elle ne peut cependant ignorer les "porte-identité", la réalité concrète de l'individu ou du groupe, matière première incontournable de l'identification.
3. Ce travail de malaxage par le sujet se mène sous le regard d'autrui, qui infirme ou certifie les identités proposées.

6 commentaires:

  1. L'identité est un processus tourné vers le futur: une construction subjective de l'individu à travers tout un ensemble d'"images de soi" et de "self-schemas" - ensemble le plus souvent de représentations contractoires de soi avec des images purement imaginaires et des "soi possibles" dont la possibilité est fondée dans un contexte historico-social particulier. L'identité n'est donc pas une sorte de "substance" qu'il nous faudrait retrouver, comme on retourne à une hypothétique nature des choses, mais quelque chose qui se construit au fur et à mesure du temps: non pas un retour en arrière, comme un repli sur un soi éternel, un noyau dur qui déterminerait toute la réalité de l'individu, mais un "pro-jet" positif.

    Dans cette construction de l'individu autour d'une identité, la constitution de schémas affectivo-cognitifs de base est essentielle: la mémoire affective animant le cadre cognitif de chaque individu joue un rôle fondamental dans la mise en place de ces schémas. C'est là que jouent les traumatismes psychosexuels infantiles. La mémoire affective est détournée vers les schémas pervers du pédophile afin de servir ses fins à lui. C'est en cela que la formation d'une identité personnelle est altérée, en diminuant la capacité d'autodétermination et de critique des schémas de maturation cognitive de l'individu.

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  2. J'ai deux identités : celle d'une vie pour tout le monde et celle avec vous : les amis, les amants, les maîtresses avec qui j'ai partagé et je partage cette histoire impalpable et intemporelle, qui permet aussi de ne pas avoir d'identité. J'ai publié sous Auteure obligatoirement anonyme, sans identité, comme si je n'existais pas et maintenant pourrais-je publier sous mon nom. Sera t-il le nom de mon père ou celui de mon mari ? Et moi, qui suis-je ? Et ces amis dont je parle dans mon manuscrit, vont-ils porter plainte pour diffamation. "Il y a des choses qui ne se disent pas" et on perdure avec le refrain bien connu.
    j'ai mis en ligne un portrait en pensant à Philippe :
    http://resilience-autofiction.over-blog.fr/

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  3. Réduire l'identité à un nom, quel qu'il soit ? Mais qu'entend-on par "identité" ? Qu'est-ce que cela veut dire que d'être "soi-même" ? Est-ce qu'il s'agit d'un "soi" que les autres aussi pourraient reconnaître comme moi, quelque chose de partagé ? Est-ce qu'il s'agit d'un "soi" intime, caché ? Est-on sûr de pouvoir se reconnaître dans ce soi ? Ou, plus qu'une "re-connaissance", s'agirait-il d'apprendre à se connaître, y compris à travers les autres et à travers ses propres blessures. Est-ce que nous nous appartenons entièrement ? Je suis aussi ce visage dans le miroir, visage ô combien odieux pour des raisons que je connais bien, mais visage perceptible aussi par les autres qui, eux, ne le trouvent pas si odieux. Est-ce que je peux me tromper sur moi-même ? Est-ce que les autres peuvent se tromper sur moi ? Je répondrais Oui aux deux questions.

    Être soi-même, c'est choisir parmi les différents choix qui nous restent, c'est aussi lutter pour ne pas devenir fou dans certains cas: je suis cet adolescent transi de froid dans la forêt qui regarde coulé son sang sur la neige, mais qui ne meurt pas, sans savoir si c'est par lâcheté, par fatigue, ou parce que même la mort n'a plus aucun sens. Mais je suis cela dans la mesure où je donne aujourd'hui un sens à ce passé, où je dépasse l'automate mû par les mécanismes des apprentissages pervers qui lui ont été concoctés par d'autres automates pervers. Je suis moi dans la mesure où je me reconnais et me réfléchis pour aller au-delà de ma propre réflexion, où je me construis une image de moi concrétisable en ce monde, acceptant non seulement moi-même, mais le monde en bloc.

    Peu importe le nom si l'anonymat est un choix. Ce n'est pas là l'important, à moins qu'une décision ne soit prise en ce sens. Ma mère est morte, et je ne peux plus la traîner devant les tribunaux - de totues façons, les faits sont prescriptibles. Son amie est encore vivante, et j'irai sans doute la voir lorsque je serai prêt. Tous les autres sont aujourd'hui couvert par l'amnésie et je n'ai aucun élément contre eux.

    Mais poursuivre le monde entier en justice ne suffit pas à me donner une identité: pour cela, encore faudrait-il que je veuille une identité, un "moi-même" capable de se soutenir lui-même et de se sustenter des nourritures du "soi". Pour fuir la répétition infinie et automatique des symptômes traumatiques dans chaque aspect de ma vie, il faut que j'en arrive à construire une identité dont je puisse me sentir responsable, quelle qu'elle soit.

    Je ne sais pas si je me fais comprendre: ces pensées sont à l'état d'ébauche seulement, et il faut encore les mettre à l'épreuve.

    En tous les cas, j'ai lu le blog que tu mentionnes et je le trouve captivant. Jamais je n'écrirai aussi bien. Je ne suis pas très littéraire moi-même, mais j'aime tout de même quand un texte est bien écrit et bien stylé, et j'aime ce que tu écris.

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  4. Je suppose que tu ne fais pas un blog parce que tu ne sais pas écrire n'est-ce pas ? et bien sûr que c'est le contraire. Tu sais que tu écris très bien. Tu sais que tu peux faire passer des sentiments, faire passer des émotions et là est l'écrivain. Ensuite, il y a beaucoup de travail. Une semaine pour ce petit chapitre sur Julien qui lui ne savait pas écrire. Pas d'émotion ou retenue. La guitare hurlait elle n'était pas musique.
    A plus tard pour l'identité, le nom entraîne la reconnaissance et ma reconnaissance par moi-même. Je développerais.

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  5. J'écris pour moi-même, parce que je déteste écrire à la main, vu que je hais mon écriture (les mains nerveuses glissent sur le stylo). Ecrire sur un document stocké sur un disque dur : le document serait détruit plus vite qu'il ne serait né. Ecrire sur ce blog pour fixer des idées, constituer une mémoire qui vienne compenser peu à peu ma mémoire perdue. Je peux toujours supprimer ce blog, mais je ne le fais pas du fait de la présence de vos réponses et je me contrains moi-même, ainsi, à garder des traces.

    J'écris pour moi et je sais que ce que j'écris a un sens pour moi. "Ecrire bien", pour moi, signifie écrire dans un style destiné aux autres. Ici, tout ce qui est écrit a du sens avant tout pour moi et, si d'autres y trouvent du sens eux aussi, j'en suis content, mais ce n'est pas quelque chose que je maîtrise. Il n'y a aucune maîtrise dans mon style et mon expression ici, hors du contrôle habituel qui amortit tous les sentiments, qui les met en mode "silencieux". Sans doute les sent-on, mais ce n'est rien par rapport à la tempête qui me cerne à chaque instant. Je sens les marques de cette tempête ici et là, sur des repères précis pour moi seuls, dans ce que j'écris. Une identité cachée ? Non, un chaos maladroitement dissimulé, indétectable sur un visage arborant toujours un vague sourire à la fois narquois, triste et soumis. Mal dissimulé, car l'autre sent bien quelque chose, mais incompréhensible, sauf à moi-même.

    Et puis, après tou, il y a bien aussi la peur de l'autre, d'être mal jugé, d'où une volonté de s'exprimée toujours affaiblie par la volonté parallèle de brouiller les pistes... et aucune maîtrise dans tout cela.

    Bien écrire, c'est aussi maîtriser style et contenu et ça, je ne peux pas le faire. Ce que j'écris est sincère, mais d'une sincérité contradictoire, qui révèle et cache à la fois, qui se livre, mais seulement en partie.

    Dans ton portrait, tu maîtrises forme et contenu selon les canons littéraires généralement acceptés, et ce sur des thèmes profonds. Tu réussis à exprimer des concepts et des émotions en respectant les formes littéraires là où je ne respecte que la grammaire.

    En tous les cas, j'attends avec impatience tes réflexions sur l'identité. En ce qui concerne le nom: mon nom de famille a autant d'importance que mon père a pu en avoir dans mes vicissitudes, à savoir aucune. Quant à mon prénom, il a été perverti et sali. Je me suis forgé une identité en-dehors du social, en marge, et je me suis arrangé pour assurer une insertion minimaliste grâce à un travail qui me tient enfermé chez moi, à l'abri du monde. Bien entendu, le social ne peut jamais être exclus puisque la société est présente même dans cet ordinateur que je n'ai pas produit, dans l'école dans laquelle j'envoie mes enfants, et ainsi de suite. Mes études de philosophie qui font partie intégrante de mon identité sont elles-mêmes un produit social, mais tout cela est une éternelle compensation pour tous les apprentissages que je n'ai pu faire dans les stades de développement appropriés. Il s'agit bien là des troubles identitaires que j'essaie de cerner. Mais là, je suis conscient d'avoir saquté des étapes et d'être relativement incompréhensible.

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  6. Extrait du tapuscrit des Interdits ordinaires :
    Camille ne cherchait plus son identité, elle n’en avait jamais eu, elle s’était effondrée. On la voulait ci ou ça, mais elle n’était rien et subsistait dans un rêve. Continuellement, elle se laissait happer par de nouvelles identités avec lesquelles elle discutait. Camille sentait que seule l’écriture lui donnait une cohérence, qu’elle devait se réapproprier ce droit en suivant VOLTAIRE dans ses lettres philosophiques pour ne pas couler : « C’est l’amour de nous-mêmes qui assiste l’amour des autres ; c’est par nos besoins mutuels que nous sommes utiles au genre humain ; c’est l’éternel lien des hommes. »

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